mercredi 14 mars 2012

En attendant les vers - un deuxième extrait

En attendant les vers de Michaël Moslonka, parution en avril !

En attendant, les éditions du Riffle vous offre la possibilité de l'avoir en avant-première pour une livraison autour du 20 mars.
Les modalités de commande sont ici:








  Quatrième de couverture

Auchel, automne 2010.
Virgile David Blacke n’est plus flic et Amélie Laribi a endossé sa veste de capitaine.
Ces deux-là ont travaillé ensemble. Ils se sont supportés. Ils ont sympathisé.
Étaient-ils autre chose qu’un couple de chiens policiers dans un jeu de quilles ?
Pendant que Blacke s’interroge, la Police découvre sur un ancien site industriel cinq cadavres : le massacre d’une famille entière, celle d’un « enfant du pays » qui rêvait de faire découvrir aux siens sa ville natale, quittée vingt-cinq ans plus tôt. Et voilà que se joue un film commencé au milieu des années 80… un méchant film qui mettra en scène sept salopards : une prostituée, un mal-aimé, un prêtre-clown, un motard en fauteuil roulant, un ex-dessoudeur de buraliste, un Polak mort-vivant et un recycleur de pieds nickelés…



Deuxième extrait


L’agonie au choix
 
Affalé dans son canapé, mal rasé, nu sous sa robe de chambre élimée aux coudes, David Blacke attend les vers. Sur l’écran de sa télévision, la gamme des chaînes TNT tourne en boucle, sans interruption.
Dire que ce quarantenaire d’ex-flic se laisse aller serait une douce interprétation romanesque. Il est en mode autodestruction. Une autodestruction lente et amère. Une agonie recherchée dans laquelle il se noie depuis que Laribi, la chienne policière à son maîmaître, l’a abandonné. Sans parler de sa folle de mère qui l’a rayé de son existence.
Barrez-vous ! Crevez ! Maintenant qu’vous n’servez plus à rien !
Blacke se marre. Sans traces de joie.
Ses sarcasmes ont cessé de le divertir. Ils l’ont désennuyé durant quelques semaines après le départ de sa génitrice ; désormais, ils ne sont que les ersatz d’un cynisme qui, auparavant, l’aidait à affronter la médiocrité de ses contemporains associée au misérabilisme de sa carrière de policier.
Ouais, allez au diable…, ressasse-t-il d’une voix mécanique.
Dans sa main, la télécommande continue de zapper. Depuis combien de temps est-il prostré là à jongler avec la planète TV ? Il l’ignore. Il a perdu le fil des minutes – voire des heures –, à l’instar du déroulement du calendrier, qui ne l’intéresse plus.
Merde ! Jeux télévisés savamment débiles, émissions de cuisine à vous rendre anorexique, séries colorées à outrance interprétées par des imbéciles heureux, téléfilms dégoulinant de bons comme de mauvais sentiments, résumés de reality show mettant en scène des minables pathétiques, safaris-documentaires pour aventuriers néo-moderno-colonialistes sédentaires, débats populistes entre langues de vipère et théâtrocratie politico-politicienne, cette farandole de conneries se succède sous ses yeux rougis par le trop-plein de déprime… Elles l’hypnotisent au lieu de le lobotomiser !
Blacke aimerait oublier. Son parcours, ses échecs, les coups reçus à cause de ses choix ou de la fatalité, la trahison de celles qu’il appréciait tant… Jusqu’à sa propre existence. Il aspire à la sérénité. Au vide total. Au lieu de cela, il a l’impression d’accumuler. Ce qui explique sûrement pourquoi certains automatismes ressurgissent. Sa vision sarcastique du monde et des individus étant de ces habitudes-là…
Il peste entre ses dents. La Vie est une emmerdeuse !
Ben alors ?, s’indigne-t-on. Ça fait au moins une heure que je poireaute !
Une fille se tient au pied des escaliers qui mènent à sa chambre. Le physique d’une jeunette de dix-neuf ans, la silhouette longiligne, les cheveux raides, blonds décolorés, les mains sur les hanches, les lèvres épaisses d’un naturel très rouge et la lippe boudeuse. Totalement nue.
Blacke ouvre des yeux de merlan frit. Il l’avait oubliée, celle-là… Comment s’appelle-t-elle ? Il ne sait déjà plus, il s’en fout d’ailleurs – un bon point pour sa cure de sérénité !
D’amours déçues en amitiés amoureuses décevantes, il s’est débarrassé de toute relation impliquant des sentiments. Histoire de conserver une certaine hygiène, il a opté pour le sexe tarifé, et aussi parce que son corps a des besoins que sa déraison nihiliste aurait tort d’ignorer…
Ben, tu réponds rien ?, insiste la nymphette, les seins arrogants. Tu m’dis de t’attendre et tu reviens pas ! Pis, là, tu me mates comme si tu me connaissais pas…
L’ex-flic lâche sa télécommande, désœuvré. La fille joue à la blondasse de service, alors que c’est visible comme le nez au milieu de la figure : elle n’est qu’une fausse blonde. La prétention n’a décidément plus de limite. Bien sûr qu’ils ne se connaissent pas !
Blacke n’a plus envie de coucher avec elle : cette conne sans nom réveille sa capacité de s’indigner. Un comble. Ses hormones sont d’un avis différent. Sous sa robe de chambre, il bande plus rude qu’un taureau. Qu’importe, sa volonté aura le dernier mot !
Ton fric est sur la table, tire-toi !
Au tour de la fausse blonde d’écarquiller des yeux de merlan frit.
Hé ! J’suis une pro, moi ! J’pars pas tant qu’le job…
Dégage ! Prends ta tune et barre-toi !
Furibarde, la pro remonte à l’étage. De retour au rez-de-chaussée, elle s’est revêtue. Elle enfile ses chaussures puis son blouson, pour ensuite s’avancer vers la grosse bobine de câble qui sert d’unique table de salon. S’emparant des cinq cents euros qui l’y attendent, la conne sans nom crache à la figure de Blacke :
Puisque tu préfères t’amuser avec ta télévision plutôt qu’avec moi, t’as qu’à t’enfoncer ta télécommande dans le cul, pauvre type !
Sur cette élégance, elle traverse la pièce en coup de vent. Ses hauts talons claquent sur le plancher, troublant l’ambiance poussiéreuse de la tanière du pauvre type, meublée uniquement de cartons, de quelques chaises, d’une bibliothèque remplie de cassettes vidéo et de la bobine en bois.
Ah, la pute !, commente Blacke en silence, posant sur le dos de la nymphette un regard lugubre.

à suivre...

Le premier extrait est à lire >>>> ICI


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